Samothrace est indissociable de sa « Victoire », véritable ambassadrice mondiale de cette petite île de la mer Egée. Du haut de ses 1 611 mètres d’altitude, elle est le promontoire idéal pour l’envol des mythes et des légendes d’une civilisation vouée à la liberté sauvage.
L’île est une oasis méditerranéenne où l’eau est abondante toute l’année et la végétation riche peint dans le paysage un vert qu’on ne connaît pas ailleurs dans toutes les îles grecques. Samothrace est couverte de chênes, pins, châtaigniers, arbres de Judée, platanes d’Orient, plantes du maquis. L’île a été peuplée dès la Préhistoire. Dans l’Antiquité, elle était le sanctuaire des Grands Dieux célébrés par le culte des mystères la rendant ainsi sacrée aux yeux des Grecs.
Selon la mythologie grecque, Dardanos, fondateur mythique de la ville de Troie, en est originaire. Elle a ensuite été habitée par une colonie d’habitants originaires de Samos à la fin du VIIIe siècle et elle devint ainsi la Samos de Thrace, d’où son nom Samothrace. La christianisation de l’Empire romain d’Orient fît de l’île un territoire essentiel de la civilisation byzantine jusqu’en 1204 où elle fut conquise par la quatrième croisade. En 1355 elle passa dans le giron d’une famille génoise (les Gattilusi) avant de tomber sous le joug turc en 1457 pour près de cinq siècles. Après que la répression turque ai exterminée la presque totalité des habitants, l’île se repeupla à partir de 1923 avec l’arrivée de populations grecques d’Asie mineure.
Par son emplacement géographique prestigieux, la vitalité de son commerce et l’abondance de ses ressources naturelles, l’île s’est hissée, dans les temps archaïques, au rang de cité-État disposant de sa propre monnaie et d’une importante flotte de guerre. Samothrace a été connue sous plusieurs noms au cours de son histoire : Saonnisos, Lefkosia, Lefkania, Lefkonia, Dardanie, Elektris, Etheopia (Isichios) et au Moyen-Âge, Mandrachi, Sanctus Mandrachi, Samathrachi, Samotratia. La diversité des dénominations de l’île au cours des âges montre combien elle a pu être le creuset influent d’un brassage social, économique, ethnique et culturel.
Cette richesse donne, encore aujourd’hui à l’île un caractère unique qui semble vibrer derrière chaque pierre et dans l’essence de chaque être vivant. Le tourisme ne commencera à s’y développer qu’à partir des années 1970. Samothrace est, malgré tout, épargnée par le tourisme de masse, en raison de sa situation périphérique, de sa relative difficulté d’accès et de son petit nombre de plages (Pahia Ammos, Vatos, Niki, Kipos). Elle intéresse plutôt les amateurs d’histoire, voire de mysticisme pour son sanctuaire des Grands Dieux, les randonneurs et ceux qui aiment les points de vue spectaculaires comme le mont Fengari. Elle est populaire auprès des touristes allemands.
Une petite station thermale peu connue, mais très agréable existe à Loutra. Depuis l’époque romaine, on peut s’y baigner individuellement ou dans une piscine collective. Les bienfaits de ce thermalisme insulaire n’ont rien d’exceptionnel sur le plan curatif, mais le lieu donne l’occasion de recevoir la meilleure médecine de l’âme qu’est le rêve. Le petit port de Kamariotissa, malgré ses charmes discrets, reste assez banal quand Chora, chef-lieu de l’île, situé à l’intérieur des terres est, lui, construit en amphithéâtre à flanc de montagne. Cela donne à ce village une forme de majesté qui souligne son caractère pittoresque et remarquable.
On rencontre sur l’île, sans avoir à trop les chercher, car tout est bien répertorié et indiqué, quelques vestiges historiques (anciennes chapelles ruinées, tours génoises). Chora a su garder de nombreuses caractéristiques traditionnelles à l’ombre de la forteresse médiévale qui la domine. Paleopolis située au Nord de l’île, est le site de la cité antique bâtie vers 700 av JC, près du sanctuaire des Cabires – ces grands dieux autrefois vénérés sur l’île – dont on peut voir encore les remparts dans un relatif état de conservation.
Dans le sanctuaire des Cabires, les fouilles de l’Ecole américaine d’archéologie ont mis au jour l’Anaktoron (VI siècle av JC), le théâtre, le propylée, et les fondations de plusieurs édifices faisant référence à Philippe III et Alexandre IV notamment. Ce site connut une grande prospérité pendant l’époque hellénistique.
A Paleopolis, on peut encore visiter le cimetière antique et les ruines des tours médiévales. Le petit musée, bien que modeste, présente, parmi diverses trouvailles, une réplique en plâtre de la fameuse statue de la Victoire découverte à Paléopolis, dont l’original, hélas comme bien des artéfacts antiques, se trouve aujourd’hui au Musée du Louvre à Paris.
D’autres petits villages comme Kamariotissa, Palaiopolis, Xeropotamos, Therma, et Lakoma offrent la possibilité de goûter au bonheur tranquille de Samothrace et d’explorer, au travers d’une architecture simple mais d’un grand esthétisme, les traces de la main et de l’esprit des générations qui se sont succédées sur l’île à la recherche et dans la construction d’un bonheur sûr.
C’est certainement le fruit de ces recherches que nous goûtons aujourd’hui, et la raison pour laquelle Samothrace inspire la paix et la sérénité. Ce n’est pas sans raison que l’île fut connue dans l’Antiquité pour le culte des Cabires qui rendit Samothrace célèbre par ses mystères tout aussi chargés de sens que ceux d’Eleusys par exemple.
De nombreux personnages importants y ont été initiés, comme l’historien Hérodote, l’un des rares auteurs à avoir laissé quelques indices sur la nature des mystères, mais aussi le roi de Sparte, Lysandre, ainsi que de nombreux Athéniens. Le culte est encore mentionné par Platon et Aristophane dans les écrits qui nous sont parvenus.
Les Mystères des Cabires, ont été célébrés dans l’île tandis que Homère a imaginé, dans l’Iliade, une scène où le dieu de la mer Poséidon regarde la guerre de Troie : « depuis une colline de Samothrace, il baissa les yeux et vit les Grecs et les Troyens engagés dans un lutte fratricide ».
Samothrace est, sans conteste, l’endroit idéal pour vivre au contact mystique d’une terre vierge qui propose une exploration sensuelle et intime des plus grandes questions sur la vie et la nature dont les secrets, hors de la méditation, semblent, partout ailleurs, impénétrables.
Mais Samothrace est également un défi physique en elle-même. En effet, il n’est pas possible d’en faire le tour complet en voiture, par exemple. Ce bijou insulaire doit se mériter et il faut accepter de le parcourir à pieds pour qu’il délivre ses secrets, ses messages et ses points de vue superbes. Les marcheurs et les alpinistes y trouveront un paradis pur. L’altitude trouve son reflet dans les profondeurs d’une eau céruléenne qui hante les rêves de ceux qui ont eu la chance de la voir rien qu’une seule fois.
Les plongeurs pourront explorer sans fin les trésors sous-marins de Samothrace et se prendre, un instant, pour Poséidon lui-même. Ensuite, chacun pourra repenser à toutes les merveilles et mystères de l’île en rêvassant sur les plages de Pachia Ammos et de Kipi. S’il est dit : « Heureux qui comme Ulysse a fait un long voyage », il est tout aussi certain qu’heureux doit-être celui qui a connu Samothrace !
Les méditatifs, les marcheurs de corps et d’esprit, les artistes, les poètes et les hommes libres devraient tous vivre à cet endroit, et qui sait, il y aura peut-être quelques murs blancs formant une petite maison, écrin de vie, pour les accueillir.
Nous le leur souhaitons.
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